se retirer avec le jazz avec le piano avec le syncopé se retirer avec la trompette se retirer avec le trombone avec le saxophone se retirer avec la batterie avec la certitude se retirer avec le rythme se retirer avec la voix avec la voix avec ce qui perce avec ce qui pousse avec les notes qui montent qui montent avec le mode mineur se retirer avec les quintes diminuées avec les septièmes avec ce qui est connu avec les débandades se retirer avec les descentes les glissades à genoux se retirer avec le brio avec le syncopé avec ce qui brille en sourdine avec les applaudissements se retirer avec le contrepoint avec les figures hardies se retirer avec la certitude avec la grosse caisse se retirer avec taper dessus avec roulements avec ce qui coince avec ce qui cherche avec ce qui sent se retirer avec le souffle avec la sueur se retirer avec le chuintement avec le frétillement avec ce qui couine se retirer avec l’attention avec l’attente avec le retiré avec le ahanement se retirer avec la persistance avec le cri avec le râle avec le soupir effréné se retirer avec la joie avec le répété avec l’accident avec l’ornement avec le silence se retirer avec scander avec n’en pas finir avec rebondir avec ralentir avec obstination avec résolution avec tourner rond
se retirer avec panache avec harmonie avec grandiose avec charme avec tranquillité
la vie petite chosedans le lieu c’est un répitdans ce lieu écritdans ce lieu avec lettresdont certaines se doublentquand d’autres, pressées,s’enfuient,trébuchent,tombent,ce dansant de lettres vivesne se redouble pas.
le soleil se leva à l’Est ce fut non un embarras / mais non une découverte / mais ce fut un usage ce fut un appel ce fut une orientation
France cadre devint une épopée une traversée une rivière vigoureuse tous les reliefs tous les chemins ce furent des rochers des montagnes des courants d’air, trop peu
cadre France inclut des châteaux pentes raides à gravir & places d’armes glaces à lécher des formes de variations quant à l’occupation des sols
eux continuèrent : ils chantèrent avant que le soleil se lève cachés, la précision de leur chant eut pour but la réalisation parfaite de « cadre » qui s’ouvrit alors.
Elle n’a rien d’autre à faire que d’entourer le bocal avec ses bras. À cet instant, c’est ce qu’elle doit faire. Mais qu’est ce que vous faites, Roberta ? Un panorama, je fais un panorama. Et de s’accrocher au bocal plein de bonbons multicolores dans son tablier rose. Dehors, les voitures passent, s’arrêtent, grosse activité sur l’aire. Essence, diesel, vapeurs, paroles. Bruits secs, les portières, les démarrages, les moteurs si rassurants, la fumée. Des familles s’étirent. Il fait un peu gris pour un été. La boutique se remplit de pisseurs et d’acheteurs de nourritures sous cellophane, de cacahuètes. Autour des machines à café, des insectes cherchent de la monnaie. Des enfants ineptes posent trop de questions. Des mères fardées croient qu’elles vont à Las Vegas.
Roberta s’accroche au bocal, il est trop tard pour changer d’avis, c’est son rayon après tout, on le lui fait assez remarquer, c’est ton rayon. Elle a une idée, c’est son idée, il suffit de ne pas paniquer, elle ne panique plus, il ne peut rien lui arriver. Son panorama elle n’y avait pas pensé avant mais maintenant qu’elle le fait, ça lui plaît, c’est complet : un geste, un sentiment, une réponse calme. C’est l’autre qui est surpris, c’est l’autre qui lui pose la question. Pas méchante sa question, juste un peu étonnée, éberluée. Mais pas autant que la réponse que Roberta fournit pratiquement. Comme si c’était la vraie réponse, la seule réponse. Entourant son bocal, le verre devenu chaud confit contre ses seins, Roberta ressent sa propre température. Oui elle nettoiera les bocaux, oui elle les époussètera, oui. Mais elle aura son panorama à elle ; un geste ; un sentiment ; une réponse.
suidre, verbe absent, advint en même temps qu’un visage aux traits visibles selon un angle précis
dans cette lettre, suidre se détache, admirable autant qu’inexistant, comme le visage de cette femme
le texte de la lettre existe moins que le regard porté sur lui son visage existe moins que le regard porté sur elle
la lettre, destinée à une lectrice particulière contient des phrases toutes compréhensibles, sauf ce mot
le personnage auquel appartient le visage photographié légendé par son nom, se trouve dans un magazine
comme un verbe emprunté à Huysmans, suidre se rapporterait à soi, à son absence, à sa disparition
le seul mot inexistant de la lettre montrerait le chemin à suivre (un visage de femme effacé que seul un regard pourrait révéler)
[en présence des pages décollées, volantes, annotées, d’un livre vert à la couverture illustrée par trois énormes dés (photographisme H. Cohen) : Maurice Blanchot, Le livre à venir, article Joubert et l’espace –
1. Auteur sans livre, écrivain sans écrit –, Gallimard, collection Idées NrF, 1959, achevé d’imprimer le 28 juin 1971 … il y a exactement cinquante ans ce jour d’hui]