dans la flaque l’écho du minuscule et de l’immense

nous hésitons devant la mer, qui tout d’un coup nous paraît plate,
et la ligne d’horizon muette,

nous réquisitionnons (le sens)

parce que ce n’est pas lu, ce n’est jamais lu comme ce devrait, l’éloignement s’impose,
parce que ce que nous avons sous les yeux n’est pas propice,
nous devons nous éloigner,
parce que tel qu’est le paysage, nous manquons de hauteur :
reculons-nous, éloignons-nous

il s’agirait de s’éloigner, d’avoir de la visibilité,
la plus visible des visibilités comme en haut d’un panorama montagneux,
comme le majestueux donne le la d’un paysage aux gravitations retournées (qui cacherait au fond de ses vallées nombre de vies)

la visibilité nous a été donnée dès le lever des brume matutinales, lentes

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la ligne d’horizon était loin, loin de nos yeux, et n’existait pas
nos yeux ne pouvaient pas la voir,
ils la scrutaient pourtant avec insistance,
l’insistance de ceux qui existent et cherchent

là-bas loin, on ne pouvait rien apercevoir, la côte de l’autre bord,
le bord de l’autre côte : absent au voir, soustrait liquide bleu vert
amenuisé de dire, jouant avec les cailloux et le sable
y traçant dessins pour le prochain passant

nous avons cherché dans la flaque l’écho du minuscule et de l’immense

plus tard, il y eut ce dialogue, qui est le commencement de tout,
et dont la question est le régime de routine :
la ligne d’horizon avait une couleur, quelle en était la couleur ?
blanche, peut-être blanche, il nous semble que blanche

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nous entendons les voix de ceux qui attendent derrière leur soupirail,
ils veulent avoir accès au panorama vert, bleu,
de nuances de vert et de nuances de bleu, les nuances infinies,
ils veulent l’infini (il n’y a d’insistance que d’exister)

UN ROMAN DES JOURS RAPIDES – jour 14

jour 14 – Depuis que VM a mis une chemise hawaïenne, quelque chose a changé. Vraiment. En profondeur. La coiffure est toujours la même (cette dissymétrie capillaire et grise parfois flamboyante à cause de la masse d’un seul côté). Devant lui, de l’eau. Quelque chose ne va pas. Mais pourtant c’est exactement cela qui se présente : une curiosité faite VM en chemise hawaïenne.

Le drame du paysage, c’est qu’il est sous les yeux et que trop souvent il induit une description, puis, plus ou moins rapidement, avec plus ou moins de constance, des personnages. Un homme marche très lentement ; il porte des sandales marron, dans une teinte qui n’est pas sans rappeler le visage de VM l’été, olivâtre. VM avant qu’il cesse de se mettre au soleil, après qu’il a cessé d’écrire. C’est bien triste. L’été continue de passer, plusieurs fois de suite. Deux jeunes femmes dans des robes très colorées et courtes, aux mollets très formés, partent ensemble après qu’elles se sont retrouvées puisqu’elles avaient rendez-vous, probablement pour déjeuner. Le monde se réduit souvent au déjeuner.

Le déjeuner serait infini, il n’y aurait plus qu’un seul déjeuner, d’un point A à un point B. De même que la joie serait durable, donc infinie, il n’y aurait qu’un seul sentiment. Un seul estomac.

Pendant ce temps, le temps de l’amour, le temps de la blanquette, le temps des considérations, les événements ne s’arrêtaient pas, et même survenaient, comme il est dans la logique des choses. Il y a lieu de préciser le déchet, car la déchetterie de tout ce plein est à ras-bord : il y a urgence.