pipelette dancing

[choix de triolets prélevés sur facebook, publiés entre mai 2017 et novembre 2018,
composition spéciale pour la revue PØST
]

où je fus
j’ai rapporté une vague
(paresse)

la peinture a cloqué,
puis s’est rétractée
les voix enflent, puissantes, mêlées

j’ai mis
ma robe blanche
du dimanche

choix du jaune, de l’orange
choix de l’orangé,
jaune et orange arrangés

je viens de jeter une bulle de temps
équivalente à d’autres
(tu tries les bulles ?)

la discussion porte sur l’événement
or le néant précède l’être
…et le suit (toutou)

“les internationales sont mortes,
les forêts sont l’éternité.”
Ivan Chtcheglov

paroles d’opérette
pansent ma faiblesse
yeux fermés

personne n’aime le vent glacial
le vent le soir le noir
on nous enferme et soudain !

parfois il est l’heure qu’on imagine
alors qu’on est persuadé
de n’être pas horloge

vindicte ersatz de guerre
politique de la mouillette
(les 2 points où on veut)

tard le soir je me déguise
en vieux msika
babouches glibettes

ô énamourés de la planète
adorateurs de lointains
& dépenseurs de kérosène

elle coupa sa propre tête
je vis des pépins :
c’était une pomme

sans ciller ni sourciller
sans cils ni sourcils
je me nomme mon petit chéri

je me suis fait agresser
sexuellement
par la ménopause & le cancer

l’ONU réclame l’arrêt des bombardements
et alors ?
alors rien

toujours
préserver
une légère insuffisance

j’examine assez froidement
tous mes alibis ;
ma paresse reste immense

en gros, ne s’occuper que du rhème
– pas du thème –
et manger des fraises

cher Don DeLillo,
vous me donnez envie.
(formule, signature)

une lettre entre décider et décéder
hum…
quelle belle journée !

enfin, une femme
a parlé à son chien
en italien

psychopatho de la vie quotidienne
aiguiser ciseaux
passer aspirateur

peu de verbes
savent rester eux-mêmes
ils ont tendance à glisser

chais pas chanter, moi
c’est pour ça qu’chuis dans la viande
(jeune boucher)

un homme dort
un autre le dépouille
sous mes fenêtres

il y a des paroles qui accrochent
et des qui non
et le joyeux travailleur siffle

mes mains sentent
le beurre rance
le danger serait partout

un type répète
va à la maison
à sa vache

j’ai vu passer une femme
déjà deux fois
elle aime le jaune

ce lundi le vent
agite certaines feuilles
de certains arbres

je jette le fichier
<n’y arriver pas>
et je recommence

après avoir dissous
l’Assemblée Nationale
je me rends chez ma coiffeuse

les idées viennent une par une
le monde sur mon balcon
leurs voix d’enfants

je vous regarde ici
j’ai mis des timbres
ici ça me regarde

les tournesols sont grillés
complètement grillés
la photo est dans ma tête

les questions que je me pose
dans ma douche
résonnent dans la galaxie

tout le monde
aime le soleil
parce que les ombres

un film l’après-midi
presque aussi bien
qu’un Rohmer

je cherche le passé
d’un participe présent
sûre qu’il existe mais où ?

je connaissais une femme
qui disait toujours OK
elle est morte

‘celui qui s’en croit’
de Helvetica à Times
ex abrupto

conférence sur le roudoudou
accès libre
date et lieu à fixer

lecture à haute voix
des conditions de garantie
d’un matelas

dans l’écrit c’est écrit
où est la sortie ?
pipelette dancing

Auteur/autrice : Édith Msika

Une théorie de l'attachement, P.O.L, 2002 / L'enfant fini, Cardère éditeur, 2016 / pipelette dancing, Editions louise bottu, 2022 / L'homme en bleu, Julien Nègre éditeur, 2022 / Introduction au sommeil de Beckett, Julien Nègre éditeur, 2023 / & textes dans des revues : larevue* 2019, 2020, 2021, 2022, Revue Rue St Ambroise (n° 45, 2020), TXT n°33 (2019), Jungle Juice (#6, 2017), + sur le web : Atelier des auteurs P.O.L, remue.net, libr-critique…

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