regarder l’horizon [prescription]

l’horizon modifié
l’horizon courbe
l’horizon traître

le statut de l’image : elle explique
l’image qui reste, qu’elle laisse reposer

l’image se repose dans l’horizon de ses yeux

il faut savoir ce qu’il faut comprendre : souvent rien

deux horizons n’existent pas
il n’y en a qu’un
et pourtant il n’est pas un : il est l’horizon

regarder l’horizon : prescription
pour le repos de ses yeux

l’image qu’elle a fabriquée de l’horizon
stagne dans des dimensions restreintes

l’horizon n’attend rien :
l’horizon et le familier
(mais pour ne pas statuer, pour ne pas dire :
le proche et le lointain, pour ne pas s’asseoir
—> rester debout dans la parenthèse)

familièrement l’horizon ! à lui faire des nattes
pour le rapprocher, le tenir, le coiffer
dans l’indolence se tenir assis, & le coiffer

l’image reste dans le repos de ses yeux
à l’horizon, séparé d’elle

situations, monuments & personnages

pas la facilité des camarades,
universelle petite fille,
pas la facilité des jours

à propos de la mort, conversation
très douce, microfibre & même mieux
pour poussière accumulée +++

situation 3 : fleurs organisées,
par couleurs nuancées, sur fond de
blonde architecture en vache gardienne

situation stable, scène de crime figée,
amples mouvements tectoniques,
rien ne se voit ou tout catastrophe

rouge & ses dégradés, fleurs, crimes
violon répétitif, minimaliste, voix
explosions en sourdine, choeurs

pas la facilité des jours : rejet
gestes manqués, jurons, dérobade
pas la facilité des camarades

………………………………………………………

bref état des jours : instant t
avec leurs (petits) ramiers perchés
et le glouglou des sources (innées)

ingestion des ordonnances
piqué des ordonnés
sauvegarde système.

Hippodrome d’Auteuil, Entrée, 2020

urgence du dépassement [tac-tac]

dans de mauvaises directions regarder ;
il y aurait suffisance et l’étalement du regard
insuffisant à en embrasser l’étendue :
la mer lorsqu’elle est là, la mer et son bord

n’est jamais là, pourtant se précisent
formes et couleurs, même si
rien ne fatigue plus, dans un intérieur,
qu’une vue panoramique*

la proposition infinitive « regarder le ciel »
vient fréquemment
interrompre sa jumelle « regarder la mer »
regards se coagulant à l’horizon

de difficiles plaisirs déréglés
laisser filer la série froide
& deviner prudemment l’issue rétractile
sous le dessin d’isthmes subtils.

* Formes et Couleurs, N°4 (La demeure), Auguste Perret et la demeure, p. 17, 1944

à l’impossible bordel amer ::::

dans les mots carrés il y a une femme qui rampe

 

le carré n’est pas un cube ou s’il l’est c’est qu’il s’est multiplié

nous venons de loin, de là-bas, encore plus loin, faibles

la dépense de signes diacritiques est autorisée en dépit du bon sens

dans ces circonstances exceptionnelles : les couper en quatre

 

dans les mots carrés, femme qui se dédit n’avale pas mouche

 

ce qui est en cours jouxte l’utile, le pratique, les programmes

tout se saute dessus et fait un tas, puis deux, à pieds joints

la joie participe fièrement à la compression des organes vitaux,

elle sort en robe de soirée et distribue des tickets à l’encan

 

dans les mots carrés, femme fatale se signale : coucou

 

dimensions, affiches, ruines, portes se sont augmentées

et au nettoyage de la carrée l’intendant fou s’est attelé

femme rampe, verticale, à l’espace fusée sonore détruit

les configurations prévisibles, et son rire s’élève dans sa fuite.

rognures de notes sur le Dasein et le Gerede

comme ça vient : de l’impossible toujours possible

une note après l’autre : le beau s’est éloigné

crainte de l’abaissement : la catastrophe a déjà eu lieu (Winnicot)

le blabla de l’être-là : est là. est, en ce sens, là.

il ne s’agissait pas de cela : alors de quoi ?

par temps de – – – – – – – remplacer les tirets par un mot

texte à trous : il l’est toujours, puisque la langue l’est, trouée

nous dirions encore : quel est ce nous ? (hein ?)

ce ne sont pas des notes : non, c’est un semblant

voici des notes : qu’auriez-vous pensé de la finitude ?

L’angoisse est une disposition affective qui remplit la fonction de ménager à l’être-là une ouverture vécue et primordiale pour l’être-pour-la-mort.
L’angoisse se distingue des autres dispositions affectives en ce qu’elle met le Dasein en présence du non-étant.
L’angoisse désigne le sentiment de la situation où intervient l’épreuve authentique de la finitude.
(notes extraites de La notion de finitude dans la philosophie de Martin Heidegger,
Henri-Charles Tauxe, L’âge d’Homme, 1971)

le beau s’est éloigné : on regarde le bleu

on regarde en l’air : on lève, on relève ? on révèle ? on rêve ?

comme ça vient : le blabla de l’être-là

[autres rognures de notes]

11:48 impermanence des natures mortes

clémentines à feuilles, deux, pommes, deux, tomates, deux
flétrissement conjugué, surprise des pourrissements subits


pain, montre, chapeau, placard, CLAC


[ciel loin sur le château, oiseaux décrivant de vastes courbes inutiles]


banlieue de Londres, lit étroit, dispute, CRI


[bruit de l’horloge de pacotille réfléchi par le vide de meubles, mort jouée]


pages tournées, fauteuil, lampe, dé à coudre


[souffle du vent dans les branches, souffle soupçonné, chaleur d’un ICI]


à la même heure, esthétique des lumières


[limites du voir, de l’entendre, mur des sensations échouées, englouties]

 

disposition des meubles, place du compotier, position des fruits
occupation de l’espace, couleurs, vie, petites choses, GLING

                                       dessin de cahier avec jambages, Bordeaux, 17 décembre 1978