< l’invention de la barre d’état >

 

 

il était une fois le regard obnubilé,
vers 1986 ou peut-être 1987
la barre d’état durait plusieurs heures
souvent une nuit, une nuit où elle avançait
une nuit à fumer des cigarettes
et à contempler l’écran, lui,

le mieux était de ne pas dormir
mais le mieux, le mieux :
était surtout de ne pas dormir
de ne pas quitter cette page
avant la fin de l’opération
et, au fil des mois, des années
de constater, émerveillé, à quel point
la barre d’état allait de plus en plus vite
de constater, émerveillé, à quel point
tout allait plus vite, tellement plus vite,
à quel point c’était merveilleux
de regarder la barre d’état filer vers le néant,
de plus en plus vite

et de rester, de ne pas dormir,
de ne plus jamais dormir,
de rester à fumer des cigarettes
le regard obnubilé par l’écran
la barre d’état ayant filé dans le néant
depuis longtemps, elle.

un crayon tombé par terre et roulant –

 

 

que faut-il, hein ? que faut-il ?
il y aurait du neuf, du tout à fait neuf : quasi du sensationnel

mais : pas de conditionnel – pas d’existence du si –
parce qu’en réalité le si n’existe pas

c’est un ARTEFACT
écrit très gros en vitrine des usages au blanc de Meudon

l’introductif SI n’a pas sa place
il s’est rangé des voitures ou bien il circule à une vitesse

TELLE qu’on ne le distingue plus –
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la chute du crayon fut inéluctable
et roulant disparaissant sous un meuble

ainsi Freud en tira quelque chose
pour le tout petit enfant (une autre histoire)

mais quel meuble ? quel meuble absorba le crayon ?
aucune sorte d’action n’existe sans un geste

le départ soit du crayon soit du SI soit du véhicule
fulgurant de sa fulgurance sans limite

ce triple départ fut remarquable & simultané
bien qu’ALTERNATIF (comme le courant)

 

perspective européenne

 

 

L’ÉCOCOMIQUE

(Plate-forme programmatique 2004)

 

1 . Les gens louches (Polaroïd mosaïque).
2 . Positionnez : pas de nez.
3 . Ose européenne (2004).
4 . Contrôle technique (besoin de la société).
5 . Labyrinthe (les 4 coins pour rentrer au (ca)niveau mondial).
6 . « Je suis imbranlable ».
7 . Président de l’Europe du Monde.
8 . Les écononiqueurs.
9 . Il faut du sens, il faut de la surface.
10 . Un discours d’humain de gauche (& tu gardes l’humain de droite dans ta culotte).
11 . J’aime pas les mecs qui font plus que moi.
12 . Chaque personne est un courant (court après le hareng).
13 . On est un…(j’ai oublié).
14 . Y faut faire tout comme y faut faire.
15 . On ne peut pas enculer tout le monde (tant de regrets).
16 . Genre de bis : y a qu’à faire ce qu’y faut faire.
17 . Excusez-moi, c’est pas du 16, c’est du 1.
18 . Du moment que chuis élu (contraction), j’mens fous – 15 fois.
19 . Tais-toi quand le fasciste parle.
20 . Fracture sociale : où est le plâtre ?
21 . Les Français comprendront pas. Vous n’intéressez pas la France. Les Français attendent des réponses claires à des questions qu’ils n’ont pas posées. La réponse est plus importante que la question.
22 . On fait le discours.
23 . Il vaut mieux récurer que de se laisser envahir.
24 . Ils ont pas fait autre chose, les autres.
25 . C’est juste une parenthèse.

alias Copy Right

                                                                                                                                          artiste inconnu, métro, 2024

ne manque rien

 

 

 

le silence

Pessoa (re)

face au vide plein

théorie du gâchis, de l’en-dessous

& peu d’atermoiements

à se dire quelque chose

si tant est que

 

assise sur le bord de son lit
l’actrice se remémore les scènes
sur lesquelles elle parut il y a si longtemps
– dans sa bibliothèque un rayon Mélancolie

 

du bout de son pied nu elle déplace
quelques grains de poussière
s’émeut d’un rayon transperçant le gris
et d’un gros oiseau parcourant le pré

 

il y a toujours une fenêtre
depuis laquelle observer
la fusion de l’air et de l’esprit.

D Day ou un autre, ode à une tulipe

 

 

tu as raison de faire comme tu fais
tu ne saurais avoir plus raison
que celle qui fleurit et se fane
rouge mais pas pivoine

tulipe ! tulipe ! tulipe sans verbe
et jaune et rouge aux larges pétales pavanés
sans infante défunte aucune

ces tombes abandonnées
ces noms qui se répètent à l’envi
ces petits morceaux de verre violet
et vert et blanc tout mélangés
en ratatouille de verre étalé
leurs oripeaux d’étain manifestant
qu’eux ont été il y a un siècle

tulipe insistante malgré le rouge déjà passé
de tes trop grands pétales encore tenus
et dont le vent chavire ta tige
dans son étroite plate-bande

tulipe ! comme un mot d’ordre claqué
à la tête des empires
qui crânement propose et promeut
depuis tes attaches fines l’effet d’un drapeau fou

tulipe ! à ta raison qui s’échappe
personne ne peut répondre
tu ne saurais avoir avoir plus raison
que celle qui fleurit et se fane.

                                                                             La Dame à la licorne, ”À mon seul désir”, entre 1484 et 1538

 

[derechef lié à quoi : paf]

 

 

 

c’était si loin je ne me souviens pas
je ne me souviens pas
je ne me souviens de rien
c’était si loin
au loin je vis
au loin je voyais
il y avait
il y eut
c’était si loin
une cour des arbres
une fenêtre
au loin je voyais
au loin je vis
et je vis
je vis
je vis…