Samedi 28 mars 2009
M. Xan n’avait pas disparu, du tout. On ne savait pas nécessairement où il était, mais il ne se cachait pas. Comme de nombreuses personnes vivant dans de nombreux endroits au milieu de nombreux autres, M. Xan menait sa vie ; tentait de la mener ; la menait. Ainsi, il mangeait puisqu’il faut manger ; dormait puisqu’il faut dormir, travaillait puisqu’il faut travailler, prenait l’ascenseur puisqu’il faut prendre l’ascenseur, et d’autres moyens de transport plus horizontaux. Parfois il se demandait ce qu’il ne faut pas, enfin, quand il n’était pas épuisé par ce qu’il faut pour vivre. Alors il lui arrivait de scruter intensément une feuille sur une pierre, ou le bâtiment au loin, blanchi par la survenue d’un orage violent, ou plus banalement quelques-uns de ses ongles jugés pour l’occasion les plus intéressants. Et tandis que nombre de ses contemporains se livraient au commerce de denrées alimentaires, à l’analyse de données sensibles, à la communication de nouvelles qu’ils jugeaient de la plus haute importance, à la création d’oeuvres immédiatement visibles sur les réseaux mondiaux, M. Xan tentait courageusement de vivre avec ses yeux et ses phanères.