suis suis suis (texte)

 

 


suis / suis \ suis

dans un sens oui
dans un sens non

suis l’être
au sol
—> chauffé par le soleil

sons et peintures
revenus /\/\
couleurs passées

un peu de sang sur la touche é

suis l’être
revenu passé chauffé
légère asymétrie [occulte]

déséquilibre machinique
& cuisson sinon

la touche essuyée : é

désordres sans stades
avant pendant autour
avance recule arrêt

suis l’être essuyé
suis l’essuyé é

 

grammaire au jardin (à défaut)

 

elle photographie des chaises vides
leurs couleurs sur l’herbe etc.

elle aurait été dans l’amour l’amour
ses pieds dans des sandales mouillées ?

*

l’orage a tout nettoyé
le piano ruisselle de Brahms
j’arrache des touffes
les ongles noirs de terre
je coupe des roses
je regarde les agapanthes
j’aperçois les fraises
je médite sur la couleur des hortensias
je marche dans le jardin
il n’y a personne autour
je n’aime ni les gens lents
ni les gens rapides
je n’aimais pas la terre
je n’aimais pas les fleurs
les ongles noirs de terre
je me penche & pense à la figure
de celui que l’esprit a déserté

le moment est rapide
le soleil n’a pas encore tout envahi
je fais des courants d’air partout
je ne regarde presque rien
je pense et ne pense plus
le piano ruisselle de Ravel

• les oiseaux méritent une ligne à part •

 

 

chutes de papier

 

 

j’ai écrit papier de quoi s’agit-il
de petits papiers ou de gros ?
j’ai écrit papier pourquoi
le point d’interrogation n’est pas toujours
nécessaire ça dépend

chutes de papier ne sont pas du Niagara
et les isotopies ne se recouvrent pas
comme l’herbe pour conserver l’humidité naturelle
ici je peux mettre un point.

ce qui n’arrête pas « pour autant »
le cheminement de la pensée
et conformément aux Essais de Montaigne
il est des rites auxquels ne pas déroger

je mets en relation des choses
que je ne comprends pas
avec des choses que je comprends
et à cause de cela j’ai encore un esprit d’enfant

On s’habitue à toute étrangeté avec l’aide du temps.
Montaigne, Essais, III/12

                                                                                                                        La Perrière 61360 Belforêt-en-Perche

trois nuages bleus

 

 

l’aspect finances occupe le terrain
des économies en veux-tu en voilà
la dépense française en falbalas
armement à la lettre près
la défense française coûte un bras

& l’honneur…………………………………………………………

sirènes effrontées montent au firmament
bourrées jusqu’à la gueule
d’armes rutilantes en forme d’ogives
suivies par les regards militaires
jamais tant la responsabilité

ne fut

mise en cause

éclairés et calmes
trois nuages bleus paressent
au réveil lascif
comme ils paraissent
et disparaissent pendant l’attaque

peu

importe

les

différences

l’aspect finances occupe le terrain
les affaires se font malgré et avec
les circonstances
jamais aucune stance
ne servira à les taire.

 

[n’en rien déduire
par la brèche infiltré
le poème maigre
tel un poisson
ne veut rien dire]

homme, femme, fleurs, réflexion(s)

 

 

l’homme qui s’occupe des fleurs
enlève les pétales fanés tout en parlant
avec une vieille femme
tout en répondant à ses questions
la vieille femme pose des questions précises

l’homme qui s’occupe des fleurs
a la peau bronzée
on n’en saura pas plus
bien sûr qu’on en saura plus
il répond à la vieille femme très précisément

toutes les questions de la vieille femme
sont prises en compte toutes
elle réfléchit et dit encore
et ces fleurs pourquoi sont-elles en feuilles
parce qu’il arrive qu’elles soient dérangées

les fleurs peuvent mettre du temps à arriver
elles ne se trouvent pas bien là où elles sont
elles réfléchissent alors
oui il suffit d’un mètre même pas
et tout change et elles fleurissent

la vieille femme semble perplexe
elle a vu le teint hâlé les yeux noirs
de l’homme qui ôte les pétales fanés
un à un de larges pétales roses
tout en répondant à ses questions précises

longtemps après elle se souvient
du teint de l’homme et de ses yeux noirs
plus que de ses réponses
elle l’a regardé comme elle regardait les hommes
il y a si longtemps quand ils réfléchissaient

qu’elle ne s’intéressait ni aux fleurs ni aux oiseaux
mais seulement à la force des hommes
à leur musculature à leur odeur à leurs bras
peu importait ce qu’ils prenaient dans leurs bras
pourvu que ce fût elle.

 

*

 

j’ai ensuite demandé à ChatGPT :
– tu peux écrire un texte poétique sur « l’homme qui s’occupe des fleurs » (titre initial de mon texte) ?
voici sa réponse : un poème, également composé de sept strophes, bizarrement,
mais en quatrains (vs ma composition en quintils libres)

Dans un jardin secret, là où les douces brises murmurent,
Un homme bienveillant s’occupe des fleurs avec ferveur.
Tel un artiste, il danse parmi les parterres colorés,
Son amour pour la nature en chaque geste sublimé.

Tel un orchestre invisible, ses doigts habiles jouent,
Une symphonie florale dont les pétales s’épousent.
Il comprend les secrets de chaque plante et de chaque graine,
Les caressant avec délicatesse, sans peine.

Il connaît les cycles de la vie, les saisons qui s’enchaînent,
Des bourgeons fragiles aux fleurs qui se déchaînent.
Avec tendresse, il leur offre l’eau et la lumière,
Veillant sur leur épanouissement, leur destinée éphémère.

Il est l’âme qui donne vie à ce jardin enchanté,
Ses mains, telles des baguettes, sont habitées d’une magie.
Chaque bourgeon qui s’éveille est une note de bonheur,
Éveillant les sens, éblouissant les cœurs.

L’homme qui s’occupe des fleurs, gardien de cet éden,
N’est-il pas un poète, un jardinier de l’infini ?
Dans chaque pétale, il contemple la beauté du monde,
Et son amour pour la nature ne fait que grandir en onde.

Ainsi, cet homme, humble messager de la terre,
Donne voix à l’expression d’un amour solidaire.
Dans son jardin secret, il révèle une vérité précieuse,
Que l’harmonie avec la nature est un trésor merveilleux.

Alors, saluons cet homme, ce gardien des fleurs,
Qui, par sa passion, embellit notre existence en couleurs.
Son amour pour la nature, un cadeau à préserver,
Pour que ce jardin de la vie continue à prospérer.

Oeuvre de Patrick Renaud, photographe contemporain. Son site (partagé avec Marie Combes) pour un aperçu de leurs nombreuses séries : COMBES & RENAUD 

À propos du « je » universel (notes)

La langue devait être une langue simple. Elle se parla. Elle voulait se dépasser mais il n’y avait plus de dépassement. Pourtant elle descendait l’escalier, le remontait, et, tout en chantant, se faisait du cinéma. Il s’agissait d’une femme. Elle emprunta des petits noms et se tutoya.

Les noms propres des auteurs ne veulent rien dire en poésie, en littérature. Les noms propres ne veulent plus rien dire. Nature et fonction sont dans un bateau ; nature tombe à l’eau, qu’est-ce qui reste ? Nature et fonction du langage. Nature et fonction du ménage. Nature et fonction de la betterave.

Hésitant entre la politique et le trou noir de 17h. Proposant un triumvirat gouvernemental : un ticket J.D.-S.B.-F.R. En pense qui veut. Le trou noir avec un tuyau d’arrosage à la main s’évanouit ; l’eau ne pénètre pas la terre, sauf aux endroits abrités. Formation politique ancienne : KGB/FSB. Histoire du trou noir : heure de ta naissance. Ou de la sienne. De la leur. De la nôtre. Personne ne naît en même temps et du même ventre.

C’est aujourd’hui. Une araignée s’accroche à sa toile. Un lézard affolé se demande où aller. Il disparaît. Dans une jardinière en brique, la lame d’un couteau reste plantée dans la terre : le manche a disparu, réduit à l’état de moignon. Qui est en colère aujourd’hui ? S’excuser auprès d’un artichautier en lui enlevant ses feuilles jaunes et trouées. Admirer le bébé artichaut comme un bouton de rose rose unique.

L’appartenance à un secteur d’activité prouve ton activité. Sinon je te remplis ton verre ? User de certains verbes et, cahin-caha, traverser ta vie en préférant ceux en -ir. Pourquoi ? Réfléchis : partir, mourir, dormir. Tu es venu de loin ? Venir ! Courir ! Pâtir !

La langue devait être simple. Elle le fut, le sera, l’a été. Une armoire à glace au milieu d’une pièce : où est le verbe ? dit le maître ; l’élève frémit : je ne sais pas. On reprend : une armoire à glace contre le mur : toujours pas de verbe, dit le maître. Une armoire à glace n’a pas de verbe : ça va mieux, il y a un verbe. On peut passer à autre chose.

                                                                       Une petite société du Temps retrouvé (détail d’une illustration).