Il y a une forme. Il y a des coïncidences. Il y a du sens.
Et c’est un bien-être. Un bien-être au jasmin. Oui. Vous êtes dans un jardin et vous respirez. Respirez bien. Il n’y a pas de conséquences à respirer ce jasmin.
C’est très simple à comprendre : un petit groupe discute, d’accord avec lui-même. À la lisière du petit groupe, un ou deux individus ne trouvent pas leur place. Ils s’ennuient. Ils vont faire un tour.
Après les moments intenses, il y a des moments plats. Au début, c’est inacceptable. Puis ce n’est ni acceptable, ni inacceptable.
Intermède : un jour, la mer. Ça ne se décide pas. C’est un aller-retour. La mer ennuie aussi. Il y a des sens interdits près de la mer.
Quelque chose d’un visage n’existe plus. Tous les visages disparaissent. Éviter l’excès dans la description si possible.
Il y eut quelqu’un. Son visage existe toujours. Cependant son être disparaît. Combien de zigzags faut-il emprunter pour arriver ?
Il y a une forme. Il y a des coïncidences. Il y a du sens. Jusqu’au moment où plus.
elle vante son “dressing”, c’est une petite machine qui produit de la musique un napperon plié en accordéon très coloré rouge vert jaune des couleurs de cuisine l’enfant plus âgé adore son objet le plus jeune s’est pris dans le fil a failli être étranglé elle remet de la musique pour danser elle est si gaie avec son fil bleuté entre les mains qu’elle tripote en expliquant comment son fils aurait pu être étranglé mais le plus important c’est la musique dit-elle gaiement
à un moment / donné ça disparaît
les dollars arrivent avec les couleurs
étrangement pâles bien que vives leurs pointes enfantines soulignent des fragments de
! phrases !
Jean Puy, Jeune femme nue au turban sur un divan, vers 1900 (détail)
partis pour voir des choses volantes sur leurs petites allumettes frêles les enfants de la guerre au début du siècle suivant perdent l’esprit l’esprit c’est-à-dire l’esprit l’oubli l’esprit n’ayant jamais fait cela l’esprit plus ne se reconnaissant plus ne reconnaissant la cadence
partis pour voir les choses volantes arrivent aux choses loin l’esprit s’est enfui au début du siècle suivant aux enfants de la guerre la patrie méconnaissante aux yeux écarquillés les yeux hagards substitués les yeux pour voir les choses monumentales monu comme monu mentales comme mentales les choses monu/mentales c’est à dire architecturales monumentales comme on les voit à Iena par là tout autour d’Iena
choses loin c’est-à-dire sénescence c’est-à-dire choses volantes devenues loin par le vivant entraînées par le vivant attirées choses loin c’est-à-dire vieillissement du cerveau pas volant ! pas volant ! (…)
Un jour ils ont mangé ensemble dans une grande ville de province. Enfin, un soir, dans une rue piétonne. Ça a quelque chose d’anodin, la rue piétonne, et pourtant, ça peut être très agressif. On s’imagine les piétons pensifs devant les cartes de restaurants, les lumières douces, les corps se frôlant, avec ou sans intentions. Pourtant. Toutes les haines accumulées entre les êtres proches pourraient faire fonctionner toutes les ampoules des vieilles villes durant des siècles. Bref, ils se sont attablés, eux aussi, dans les lumières douces, en terrasse, avec beaucoup de politesse, s’apprêtant à passer un bon moment. Et déguster les spécialités locales, comme il se doit, ce qu’il ne faut jamais faire en pleine lumière, soit dit en passant.
Leur conversation, comme fréquemment conversation entre un homme et une femme, avait mis l’amour, quelque part entre l’entrée et la spécialité locale, sous la forme d’un panégyrique de la monogamie. L’homme en bleu en guidait le cours, détenant une certitude affirmée, pratiquement suprématiste, sur l’inutilité de chercher plus loin ce que l’on avait chez soi. La perspective de la femme en animal domestique à laquelle l’homme vouerait un culte définitif n’était pas sans lui déplaire, bien qu’un tout petit peu mortifère.
[brouillon inutilisé de L’homme en bleu, lu à la galerie Olivier Nouvellet le 5 janvier 2023, lors de la signature du livre, avec exposition des dessins originaux de Laurence Garnesson
– voir page :: et ailleurs ::]
je ne connais que mon esprit fut une phrase loufoque qui n’exista pas ou dont l’existence serait remise en cause (suspecte ?) partie des hauteurs de Grenade flottant sur les sommets enneigés
je ne connais que mon esprit aurait une fin / dérivatif lambda / longeant des plaines embrumées au loin desquelles leurs silhouettes de pierre se laissent deviner avancée lente, sans panache
je ne connais que mon esprit petit animal flétri inconnaissable et rébarbatif dans le silence et la réprobation effeuille ses possibilités au vent sournois qui disperserait ses cendres
[rythme : mat, syncope des voix, hauteurs, quelque chose d’appuyé, d’insistant nom propre chiffre 32 division en minutes cuisson, énergie disponible, etc. ]
Evidence, Soundwalk Collective & Patti Smith, Centre Pompidou, 20 oct. 2022 – 6 mars 2023
Elle prit un bain. Elle réfléchissait. Fit onduler l’intégralité de son corps pour répartir la chaleur de l’eau. Regarda le ciel crayeux / de plomb. Situation.
Dans la baignoire. Un moment / des mouvements. C’est dimanche. Elle se baigne le dimanche. Il fait gris. Ses cheveux aussi.
Oui, ils parlaient, ils dialoguaient. Ils étaient ils, et personne ne les en dissuaderait. Seul un autre s’inquiétait : qui étaient-ils ?
Il aurait fallu beaucoup de mouvements, qu’elle n’était plus disposée à effectuer, et cela, malgré une nette inclinaison à l’agitation.
Elle refit trembler l’eau. Rajouta du très chaud sous les fesses. Remua pour le répartir. Une sorte de nirvana. Le bien ultime.
Celui qui s’inquiétait lisait non loin, dans une autre maison. Les cavaliers / guerriers traversaient la plaine au galop. Aucune chaleur nulle part.
Le gris compact permet la perte, distingue la possibilité du fugace. Ils se tairaient parfois. Des silhouettes / derrière le blanc de Meudon.
D’r Hans im Schnòckeloch hät àlles wàs er will ! Un wàs er hät, dess will er nit, Un wàs er will, dess hät er nit. D’r Hans im Schnòckeloch hät àlles wàs er will !
Il y aurait Hans et les autres, dans le petit bois. Ce serait eux, ils. Des enfants chantant près du ruisseau, avec les rats.
Le long mur aussi, qu’elle longeait : un motif récurrent / un motif d’inquiétude. Le moment et celui d’après. Sa propre ombre d’enfant.
Image aléatoire proposée par l’intelligence artificielle DALL.E OpenAI
à partir des trois phrases précédentes. (voir aussi Giorgio de Chirico, Mystère et mélancolie d’une rue, 1914)
Une porte poussée, le détail d’un jardin peu entretenu, ce qu’on peut voir dès qu’on pousse un portail et qu’on met un pied là où on ne devrait pas.
Silence. Clapotis de l’eau, elle fait à nouveau couler un peu d’eau, très chaude, à distance de ses chevilles, la fait remonter vers ses reins.
Dans la découpe de la fenêtre de toit, son regard n’atteint rien, ne touche rien. Le ciel monochrome s’abstrait, elle n’a pas besoin de lui.
Une attente inquiète dans le moment d’après. Les enfants ont disparu. Elle entend la comptine résonner sur la scène du monde entier.
On se demande encore qui ils sont. Lui se le demande, non loin dans une autre maison, comme s’il n’était pas non plus une complication.
N’être jamais que le pronom de quelqu’un. Elle se laisse glisser sous l’eau. Des gens sérieux hantent les couloirs. D’autres en uniformes s’entretuent.
*
Le temps horizontal se répartit, flotte : on craint de ne pas comprendre. Ce qu’il a il n’en veut pas, ce qu’il veut il ne l’a pas…