déplacée enfouie [Schadenfreude]

 

 

le souvenir a disparu, ne reste que le souvenir du souvenir
il s’agit non pas de quelqu’un d’autre, mais d’un autre état du quelqu’un,
quelque chose s’est perdu
mais quelque chose s’est perdu

de dos tu es athlétique
quelque chose s’est perdu
quelque chose s’est perdu, mais ça ne date pas d’hier

le souvenir a disparu, ne reste que le souvenir du souvenir
qui est derrière la vitre ?
examiner les idées banales

trois morts sont apparus dans le même plan
comment aborder ce personnage
une femme conduit, s’arrête, repart près du lac, près des montagnes /
on connaît des trous des gens, des trous dans le tissu de leur histoire

de la chantilly là où seule la meringue était proposée
un épais brouillard est tombé sur le coin
ce micro-couteau suisse incluant un ciseau
la mer n’est pas que la mer
se laisser aspirer par cette atmosphère transcendentale
se laisser aspirer par l’aspiration-même
avoir du violoncelle dans les oreilles sur son lit de mort

bonjour, puis : quoi de neuf ?

                                                         Cité internationale de la langue française, Villers-Cotterêts

– illimiter le fini –

 

 

 

il est né
il fut
de une de deux
et puis rien

c’était peut-être un dimanche
ou un lundi
ou un vendredi
les plantes se trouvaient mal
il leur fallait une autre histoire
de l’espace
plus ou moins d’eau
moins de métaphysique peut-être

naissant il disparut
comme au coin de la rue
une évanescence
s’il fallait absolument
trouver le mot

qui cherche ne trouve pas
qui trouve ne cherche pas

l’esprit volubile
se répand paisiblement
dans le néant
ou plutôt dans la mare en bas
et s’y noie

 

[inspiration certitude ton tonalité gouache objet manquant]

”et à part l’écriture ?…”

 

 

à maman, fortement !

 

les humains tout petits comment
sont debout sont droits sur leurs jambes
les humains tout petits vont d’un point à un autre
dans l’espace et le temps
vont au même endroit
en sont au même point

les humains vont encore
vont et viennent dans le décor
les humains moins un moins deux
les humains à l’horaire soustraits
s’en vont remerciant à qui mieux-mieux
se bousculant dansant
dans une éternité retrouvée
cette si souriante éternité

les humains se causent inutilement
les humains tout petits comment
restent là où il sont
c’est toujours le mieux
ou sautent dans l’ailleurs
c’est toujours l’herbe plus verte
toujours l’heure de l’élan d’avant
jamais l’heure du maintenant

les humains tout petits s’égayent
comme ils peuvent avec leurs vieux outils
leurs spectacles leurs confiseries
la redevance de leur être si chère
qu’ils la confisquent dès que possible
au détriment de leur existence

L’obstacle ou l’impasse. II.

 

 

que seraient-elles, hein ?
seraient-elles organisées, ordonnées, distribuées ?
et selon quel mode de l’éloignement (aurait dit Derrida dans une fausse citation* fanée comme un costume oublié) ?

les phrases
les phrases
les phrases les phrases ad libitum
les phrases qui se répètent
les phrases imaginées
les phrases ressassées
celles qui ne servent à rien
celles qui sont ravalées mais pas comme un mur
ou comme un mur : phrases peintes phrases décollées sur des affiches à la Villeglé

ou comme un mur
ou comme un mur
ou comme un murmure
comme le murmure de jamais le murmure de toujours
le murmure du ça
du ça va ça va pas du couci-couça

phrases à la va-vite à l’emporte-pièce
misérable liberté du faiseur de phrases
phrases empilées empoilées dépilées dépliées dé(ver)gondées, etc.

jamais ne suffiraient
le pourraient-elles
qu’elles ne le voudraient oh non, pas.

* contexte de la citation supposée (?) : « la question n’est pas tant de vivre ensemble,
que de savoir à quelle distance et selon quel mode de l’éloignement ».

Journées de l’École de la Cause Freudienne (ECF), 16 et 17 novembre 2024,
axes cliniques de la thématique

 

L’obstacle ou l’impasse.

 

 

quelle est la tristesse de la route ?
quelle est la tristesse du chemin ?

– gageons que cette question intéressera nos contemporains, dit le Chef
– gageons que les zones de caravaning sur la droite auront les mêmes caractéristiques que celles sur la gauche, précise l’Adjoint du Chef
– gageons que Francis Ponge saura reconnaître les choses de la tristesse, avance le Sage
– gageons qu’il existe encore quelques trouées pour bifurquer, renchérit la Chouette

– perdons-nous ! suggère l’Effrontée
– balayons devant chez nous, poursuit la Distraite
– balayons-nous nous-mêmes, assène le Pessimiste actif

quelle est la question dès lors qu’elle est subdivisée à l’horizon des subdivisions ?

– nous n’en dirons pas plus, rétorquent les Divisionnaires
– nous nous tairons, murmurent les Prudents
– nous nous soumettrons au silence, jurent les Obéissants

Il est question d’une statue de sel qui choit. De l’imaginaire.
D’une actrice qui parle un peu fort.
D’un sentiment indéfinissable devant une grande place déserte et pluvieuse.

D’absence totale d’inspiration.
Beaucoup moins de la répétition.
De brumes et d’humidité. D’humilité.

De variations sur la place déserte et désertée.
De sa lumière un peu brumeuse.
De ses décorations un peu pauvres.

Le fait de rentrer dans un espace où on a sa place.
Les places et les carrefours.
Les places et l’espace ouvert, où rien ne corrompt la vision.

Plus de brillant, que de l’imparfait, du brinquebalant.

[récitante : la Nostalgique]

débarras du regard

 

 

c’est une idée née d’un mur et d’un arbre
plus précisément d’un mur en triangle
en ciment gris
(pourrait-il être autre chose que gris ?)

un mur deux fois « en » :
de son matériau
de sa forme
un mur n’est rien s’il n’est pas monté

et au fond un arbre en pointe
un cyprès très haut
et pas du tout si près
une pointe non triangulaire

une pointe comme un bonnet en pointe
un arbre masqué par le mur
dont on ne voit que la pointe
pourtant si haut

un mur monté ne veut rien dire
ne dira jamais rien qu’il ne veuille
un mur ne parle pas
même en ciment même en triangle

la trace ancienne d’un autre triangle
suppose et superpose une autre construction
la paupière se ferme
débarras du regard