s’attend quelque chose
quelque chose s’attend
blanc
Naday l’animal inexistant
ni mort ni vif
inexistant
patience et longueur de temps
traversant
encore
forme cheminante
ru serpentin
disparu
caché toujours caché
rien à trouver
trou.
Édith Msika, maison d'écriture
écrire et ne pas écrire : ce mouvement
[instantanés procédant de condensation et déplacement : tels se présentent les circuits courts]
s’attend quelque chose
quelque chose s’attend
blanc
Naday l’animal inexistant
ni mort ni vif
inexistant
patience et longueur de temps
traversant
encore
forme cheminante
ru serpentin
disparu
caché toujours caché
rien à trouver
trou.
Bucarest, 5 juillet 1854.
Chère et excellente tante !
C’est un grand homme, c’est à dire un homme capable et honnête comme je comprends ce mot, un homme qui a voué toute sa vie au service de sa patrie, et pas par l’ambition mais par le devoir.
Votre Léon Tolstoï
(Lettres de Crimée à sa tante, Tatiana Alexandrovna Ergolskaïa, écrites en français.)
De la main qui écrit, je perds ce que j’aurais eu en n’écrivant pas : les paroles, ces conversations, ces gens que je ne connais guère mais qui vivent près de moi, des mêmes ressources dont je ne suis pas jaloux qu’ils aient une plus grande part que moi, car c’est bien ma faute : écrire, à ma manière, me met à part, j’abandonne le terrain.
Henri Thomas
Spectacle rafraîchissant de voir le matin l’eau se mettre à courir dans les caniveaux. Tous ces rus rutilants qui font irruption parmi les voitures comme si, soudain, la campagne était là, à fleur de bitume.
Jean Clair
Comment Pascal a-t-il pu écrire, même au brouillon, que “le moi est haïssable” ? Nous connaissons aujourd’hui pire que la haine de soi : la perte complète du moi, la “désolation” (loneliness) dont Hannah Arendt a diagnostiqué les effets ravageurs sur l’homme de masse, en proie à l’idéologie, voué aux abstractions : privé de la faculté d’éprouver une expérience, il ne sait plus que déduire et encore déduire.
François Lurçat
[source commune : NRF, Juin 1984, N° 377]
partis pour voir des choses volantes
sur leurs petites allumettes frêles
les enfants de la guerre
au début du siècle suivant
perdent l’esprit
l’esprit c’est-à-dire
l’esprit l’oubli
l’esprit n’ayant jamais fait cela
l’esprit plus ne se reconnaissant
plus ne reconnaissant la cadence
partis pour voir les choses volantes
arrivent aux choses loin
l’esprit s’est enfui au début du siècle suivant
aux enfants de la guerre la patrie méconnaissante
aux yeux écarquillés les yeux hagards substitués
les yeux pour voir les choses monumentales
monu comme monu
mentales comme mentales
les choses monu/mentales
c’est à dire architecturales monumentales
comme on les voit à Iena par là tout autour d’Iena
choses loin c’est-à-dire sénescence
c’est-à-dire choses volantes devenues loin
par le vivant entraînées
par le vivant attirées
choses loin c’est-à-dire vieillissement du cerveau
pas volant ! pas volant !
(…)
je lis pas tout ça, moi
alors qu’est-ce que je lis ?
je ne sais pas
qu’est-ce que je fous
je pense que c’est ça le truc :
ce que je fous
je fous rien
jamais rien
et depuis longtemps
je regarde le monde
qui me regarde
et la mer aussi
quand elle est là
je suis là
sinon ailleurs
ce qui suit n’est
rien d’autre que
ce qui suit
ce qui suit
suit ce qui suit
en quelque sorte
d’un titre on fait suite
on résume à la louche
on est ici
ce qu’on lit
on ne sait pas
mais nos pas nous propulsent
ailleurs propice
dans une douceur
ailleurs dans une ruelle.
\pwa.sɔ̃ blø\ ≠ \pwa.sɔ̃ blɑ̃\
les mots viennent et repartent
les mots courent mais pas dans une petite cour
les mots courent ni dans une cour ni à l’avant d’un bateau
les mots courent en tous sens
se superposent, prennent la pose, composent
de nouvelles variétés, s’immergent dans des vases clos
les mots s’étagent, prennent le frais et l’ascenseur
dans un temps moyen, sans chronomètre,
ils pourrissent parfois
et même si le temps les réduit à néant, poursuivent
leur équipée sauvage dans les mémoires
des vieux gants retournés.