(des choses sur l’étonnement)

 

 

il n’y aura que des flots faux

tes impressions avec des mots
on s’en fout

auras beau te tenir à l’orée
des fleuves et des clairières

on s’en fout

n’y aura que des flots faux
des petits machins cyniques

du tu disparu
des signaux faibles

ému des souvenirs
à balancer aux lions inexistants

qui a déjà vu un lion ?

Musée Guimet, Paris

un calme règnera ?

 

 

un calme règne
une lumière blanche étrange
de ces jours sans nom
jours indifférents
exister dans les interstices

 

un calme règne
d’un autre jour
sa lumière bleutée douce
des questions l’horizon
des réponses l’absence

”GESANG”

 

 

 

les gens ont des vies de gens

il est possible que tout soit possible

le je traître, le je extérieur, le je baladeur

tout est faux et répété

il est question d’une miette

avant j’étais une miette

dorénavant je suis une miette

je ne dirai plus rien

(Gesang aurait dû être, Gesang n’est pas, Gesang est impossible,
Gesang est à Schubert ce que la pluie est à l’automne,
si ça continue, Gesang reviendra et ce sera malin, tiens)

– – – s’échapper par la voie rapide – – –

 

 

les guerres se répètent
les guerres s’aiment étroitement
il existe des alignements de pierres
le regard embrasse
toutes les lignes de fuite
le regard partout terrassé
il existe des lignes de fuite

je n’ai rien regardé
rien gardé
des guerres devant les gares

. absentée .

                                                                                                                      Gilles Aillaud, Grille n°2, 1964

à défaut dans les circulations >/<

 

il y aurait un article indéfini
& un verbe à l’imparfait du subjonctif
sans aucune concordance des temps

aucune

rien ne soulèverait de questions

rien

les alignements seraient conformes
à l’édiction des règles
autour des manques élémentaires

 

machines épuisées
rotors fragiles
embrayages divagant
souligneraient les gouffres conceptuels
des temps présents

 

et ça ne suffirait pas, non.

                                                                                           El Lissitzky, Proun* 2 (Construction), 1920 – détail –
                                                         * acronyme russe signifiant ”Projet pour l’établissement du nouveau”

avant que j’oublie /

 

 

j’ai fait une soupe
MAIS je voyais la page autrement
je suis déçue de la page
je me coupe le pouce
en coupant un légume
je crois que c’était une courge
j’aimais pas les soupes de mémé
mais maintenant c’est la mienne de soupe
ça n’a plus rien à voir
c’est même plus une soupe c’est autre chose
qu’une soupe c’est une soupe la mienne
je me coupe le pouce
je fais cramer le moteur du mixeur
une flamme sort du mixeur
j’ai très peur j’ai vu la flamme sortir
j’ai fait une soupe flamme
j’ai débranché le pied-mixeur
tout ce qui écrit est vrai
tout ce qui est orange est une soupe
je nie le fait que c’est une soupe
c’est une orangée crémeuse
c’est à peine même pas même plus une s.
je me coupe une soupe me loupe
et la page se change
elle court dans le dressing et se change
elle ressort bien nette

c’est la post-vérité soupée
tout est vrai même mémé.